Vélo et société

A Valence, le vélo s’est imposé dans l’urgence suite aux terribles inondations

Le témoignage d’un journaliste, les retours de bénévoles sur le terrain et l’élan solidaire de marques de vélo témoignent de la place primordiale prise par la bicyclette suite aux tragiques inondations qui ont touché la province de Valence, en Espagne.

© Unsplash – Daoudi Aissa

En bref :

  • Dans la région de Valence, suite aux inondations, le vélo s’est imposé comme un outil salvateur dans les déplacements de personnes et marchandises.
  • On parle de plus de 90 000 voitures détruites par la catastrophe, a minima, entraînant de forts besoins en mobilités.
  • Economique, agile, facilement réparable, le vélo a su montrer sa résilience et est très demandé par les sinistrés. Certaines marques s’organisent pour leur venir en aide et leur offrir des vélos.

Les chiffres énumérés par Chris Marshall-Bell dans un article publié par CyclingWeekly font froid dans le dos. Les inondations qui ont touché la région de Valence, en Espagne, à la fin du mois d’octobre, ont concerné quelques 79 villes et villages. 845 000 personnes ont été affectées. 325 000 d’entre elles vivent en « zone zero », où l’eau a atteint les 2 mètres de hauteur. 75 000 maisons et 44 000 commerces ont été dévastés. Et plus de 90 000 voitures ont été détruites tandis que 650 km de routes ont été endommagées. Evidemment bien pire, plus de 220 morts ont été recensés.

Boue, solidarité et vélo

Le journaliste évoque la solidarité autant que la boue, qui par endroits s’accumulait à hauteur de 30 cm une fois l’eau repartie. Un paysage de film catastrophe dans lequel la seule manière d’accéder à certains villages était la marche, ou le vélo. On y vient. Valence est une ville de vélo. La « capitale verte » de l’Europe dispose d’un réseau cyclable long de 223 km de pistes dédiées. Mais Chris Marshall-Bell dit ne s’être rendu compte du nombre de vélos en circulation qu’une fois que le désastre avait eu lieu. « Le vélo est immédiatement devenu LE moyen de transport en cette période de crise sans précédent ».

Livraison de médicaments d’urgence, de repas, d’eau, de couvertures, de vêtements… tout s’est organisé autour du vélo. Des biclous transformés en engins de transport de personnes, de marchandises, capables de combler les distances entre villages bien plus rapidement qu’à pied, et seuls engins capables de manœuvrer aisément entre les décombres. Des vélos de toutes sortes, qui se sont imposés comme outils d’entraide et de lien social, qu’ils soient des VTT, des vélos de route, des vélos en libre partage ou des vélos cargos, certainement les plus utiles vues les circonstances. Des vélos qui, comme il le résume très efficacement en quelques mots : « ont sauvé beaucoup de vies ».

© PA Media

C’est également ce dont témoigne cet excellent article de Reporterre. « On va dans des endroits difficilement accessibles en voiture ou à pied en raison de la distance. Avec le vélo, on peut aller très vite et très loin, en plus de pouvoir répondre à des besoins très spécifiques » y explique Carlos Torrealba, cycliste sur route qui a ressorti son vieux VTT pour aider. Avec ses amis, il constate qu’ils font plus et plus vite pour la population touchée que les autorités, ce qui l’agace, comme une bonne partie de la population qui ne comprend pas pourquoi elle n’a pas reçu plus d’aide de l’Etat.

Pour autant, comme de nombreux autres cyclistes amateurs, il a rejoint le peloton sous l’impulsion de Juan Dual, coureur professionnel qui s’est mis en ordre de marche dès le lendemain des inondations. « En regardant sur Google Maps, j’ai réalisé que les zones touchées n’étaient pas très loin à vélo. Les routes étaient bloquées, mais pas sur les côtés, ce qui est parfait pour les cyclistes« , explique-t-il. Les réseaux sociaux ont fait le reste.

A ce jour, alors que la vie tend à reprendre malgré l’énorme défi des reconstructions, le vélo est toujours un élément primordial de la vie de nombreux habitants de la province de Valence. On l’a dit, des dizaines de milliers de familles ont perdu leur voiture, et avec elle leur principal moyen de locomotion. Alors, l’élan de solidarité vise aussi à leur rendre leur autonomie. Des événements caritatifs sont organisés dans ce but et cette ambition trouve de l’écho chez des fabricants de moto ou de voitures, ou encore des concessionnaires qui offrent des véhicules d’occasion.

Quant aux vélocistes, ils participent à cet effort. Alessandro Mercadanti, réparateur vélo, a par exemple remplacé des centaines de pneus gratuitement depuis la catastrophe, pour permettre à autant de vélos de reprendre la route.

Un moyen de transport nécessaire

Bien souvent, les vélos sont les premiers moyens de locomotion demandés par les personnes sinistrées. Ils sont moins chers, roulent sans essence, plus faciles à acheminer d’un point de vue logistique. C’est ainsi que l’on voit certains fabricants de vélo soutenir les familles touchées par la catastrophe en offrant des lots de bicyclettes. On pense notamment à BH, ou à l’initiative de l’entreprise allemande Velo De Ville. Quiconque connaît l’histoire de cette marque et son ancrage encore très familial malgré la taille qu’a atteint le groupe sait que les valeurs humaines sont très importantes pour elle.

Le lot de vélos en partance pour la province de Valence. © Velo De Ville

« Comme tout le monde, nous sommes profondément touchés par le désastre écologique et humain qui a touché Valence et sa région. Sur place, la population s’est organisée pour survivre tant bien que mal dans ce chaos (…) La demande de vélos, moyen le plus rapide et le plus pratique pour se déplacer dans le chaos actuel, augmente de jour en jour. Des associations et des groupes de magasins se sont organisés pour distribuer gratuitement des vélos à ceux qui en ont besoin pour se rendre au travail, faire les courses, aider leurs voisins ou leur famille, etc. », résume Velo De Ville.

La marque a décidé de participer à cet effort en envoyant sur place une dizaine de vélos, ainsi qu’un vélo cargo électrique biporteur (le FR8) offert aux volontaires qui se chargent de livraisons quotidiennes dans des zones reculées et encore difficilement accessibles. C’est le magasin de vélo DoYouBike qui est le partenaire local de Velo De Ville pour cette opération.

Pour la petite histoire, c’est la visite de journalistes espagnols du magazine Ciclosfera qui a déclenché l’opération, eux qui en visite au siège de l’entreprise à Münster dépeignaient, au cours d’un repas, la situation aux représentants de la marque.

A vélo, ou pas, nos pensées vont évidemment à l’ensemble des familles et personnes concernées par cette tragédie.

  • Publié le 26 novembre 2024

En banlieue parisienne, ce quadra père de 2 enfants pratique le vélo au quotidien de manière (assez) sportive, sur route et en dehors. A des envies de longues randonnées à la découverte de nouveaux paysages.

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